14/02/09


C'est à Lefteris que je veux être. Dans la coloration diverse
de sa petite plage. Dans son air sauvage qui s'accorde
avec toi quand tu émiettes les feuilles de tabac,
absente, et les mélanges avec ce que tu achètes toujours
dans le marché agité de Potamos.
Ágios Lefteris, écris-tu, avec un couteau
sur une des planches du sol sous l'auvent.
Celle avec laquelle je naufrage en moi même inventant
des chemins jamais représentables, tu écris des sens
dont nous ne parlons pas. Ou alors c'est de nous que tu traces
.
une brève et rigoureuse ébouche. De cette vocation translucide
qu'est la nôtre por apaiser les mots devant être sacrés
que nous trahissons si souvent dans l'épineuse grammaire
des affects. Avec une petite bûche tu remues les galets
près de la ligne d'eau et le silence est une plaine
subitement et félinement attrapée par le désir. Le désir.
Non l'aveugle impulsion sans source ni direction, mais
cette avidité infinie d'être l'autre, comme une chose à nous
qui nous prolonge et nous individualise, bien loin de l'être
gratuit, qui, devise de ce temps, tue autant de gens
.
sans contours ni aliment. Le desir.
Le battement de mes veines au combat avec
le dérèglement de l'âme. Notre agréable tourment
devant l'immensité de la mer et le déclin du soleil
(ce n'est qu'à Lefteris qu'il y a un tel coucher du soleil!),
tandis que ton svelte corps escalade gaillardement la maison
et riant et rigide ressurgit avec la voix lumineuse
d' Angélique Ionatos derrière toi: Lygmos Aggelon.
C'est une chanson qui parle du sanglot transi des anges.
Une chanson qui parle de ces sanglots, de ce prétexte
.
pour que nous liberions nos oiseaux et avec eux chantions
sous les fenêtres qui insistent pour se fermer devant nous.
C'est à Lefteris que je me veux, j'y suis bien décidé!
Lieu du plus admirable éblouissement, des plus
inexprimables signes en moi, attentif et dépouillé.
Mais, entre temps, tandis que le temps existe encore et ne resiste pas,
toi qui es là et me séduis, mets de nouveau la chanson
qui parle des sanglots des anges, la voix irrésistible
de Ionatos et, de tes gestes décidés, ouvre-moi
avec douceur la fenêtre, le corps, la mort pressentie.
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D'aprés "Em Lefteris" de Victor Oliveira Mateus, traduit par Huguette Rodrigues
(le 24 Janvier 09)
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