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"méduses"
elles étaient toujours là. pourtant
ce matin-là l'eau sembla se durcir
autour du bateau. la rame était plantée dans la mer
comme dans une soupe trop épaisse, et nous les hommes
avons pris peur: le soir la plage,
la promenade étaient pleines d'inconnus.
comme de petites cloches, sauf qu'on ne les entendait
pas tinter; le matin suivant l'homme cria,
qui sur la plage avait dressé une estrade de bois
à son usage. dans un demi-sommeil encore, nous l'entendions
dans le vent de la côte faire celui qui
implore la manne. la mer visqueuse, blafarde.
trois jours, et il en vint plus toujours.
comme s'il n'y avait eu jusqu'aux aléoutiennes
que notre village, rien d'autre: hercules
et prime donne, boutiques, "magic morgan
et ses figures de cire". et des troupeaux entiers
de pochards qui d'est en ouest se répandaient
le long de la baie. ils ne partirent que la plage
couverte de gélatine, la marée
montée, et les autorités
clôturèrent le terrain. de ces gens
personne plus ne parla d'augure, du matin
du jugement dernier, de goguelins.
quand l'exception deviendra-t-elle la règle? hommes
brandissant un drapeau, servants pas rasés,
des trous dans leurs vêtements. que ce fût le matin,
que ce fût le soir - tout le monde s'en fichait.
treize coups à midi sonnés.
et des enfants qui n'étaient à personne.
d'abord on n'écouta pas le jeune homme, son histoire
semplait à peine croyable. jusqu'à ce que deux hommes
nous le confirment. bientôt tout le monde avaita entendu
quelquer chose, avait afflué: près de la plage,
comme si rien ne s'était passé, il y avait la mer,
la course des vagues. - demain, après-demain
les femmes à leur fourneaux qui, dès le matin,
font tinter leur marmites, et nous, sur la plage,
les hommes, mutiques, qui regardions la mer.
Jan Wagner In "Archives nomades" (Édition bilingue), Cheyene Editeur,
Le Chambon-sur-Lignon, 2009, pp 37 - 39 (Traduit de l'allemand par François Mathieu).
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