Mostrar mensagens com a etiqueta Salah Stétié. Mostrar todas as mensagens
Mostrar mensagens com a etiqueta Salah Stétié. Mostrar todas as mensagens

01/02/12

.
Ils ont été por moi et pour mes petits camarades de puissantes machines affectives et imaginatives, non pas arbres seulement, troncs et branches, mais aussi chevaux pour sauter l'obstacle, bateaux pour franchir le flot, avions à leur plus haut pour contempler, si l'on pouvait grimper jusque-là, ce qui se passait dans la rue traversée de gens affairés, d'autos colorées, de fillettes brunes comme du chocolat ou bien, à la façon des brioches du goûter, croustillantes et sucrées, dorées, adorées. D'être enracinés pour l'éternité dans leur sol autorisait ces arbres à s'en aller le plus loin possible, et nous avec eux. Cela, je m'en souviens, se passait il y a longtemps à Beyrouth, - à Beyrouth où j'ai été enfant. Et c'est cet enfant-là, inguérissable, qui pleure aujourd'hui, en France, dans un petit village des Yvelines, devant d'autres arbres qu'il aime et qui l'aiment, les derniers de sa vie.
Mais laissons là ces choses qui ne tiennent plus à rien qu'à simplement ce fil rouge de la mémoire, ce lacet qui étrangle. Respirons. Car s'il est musique et violon - et piano aussi, et clavecin, et le reste -, l'arbre est pour l'essentiel respiration. (...) Tant d'oiseaux dans les arbres, l'été ou l'automne, et qui chantent! (...) Pour  chanter, il convient d'abord d'être enchanté: ce qu'ils sont. Et l'arbre tout content, et tout ému, se couvre, se recouvre de plus de feuilles encore, et se met, politesse contre politesse, au langage des fleurs. Certains appellent ça le printemps: en fait, c'est un prêté pour un rendu. Respirons.

  Salah Stétié in " Dans le miroir des arbres ", Fata Morgana, s/c., 2011, pp 23 - 24.
.

 

31/01/12

.
L'homme et l'arbre sont unis dans l'imagination de l'homme, peut-être même le sont-ils dans quelque imaginaire de l'arbre. Ne parle-t-on pas du corps de l'arbre, de son tronc, de son pied? Et, de l'homme, ne parle-t-on pas de sa fourche pour définir le lieu de sa division, ne parle-t-on pas de ses racines pour circonscrire l'endroit de son implantation essentielle et vitale, - justement: son implantation? Il y a plus: il y a que le contact de l'homme avec le sol, avec la terre, se fait par la plante de ses pieds. Il y a que l'arbre et l'homme tous deux respirent et je les entends même tous deux qui chantent: l'homme chante, l'arbre chante, et parfois de concert. En outre, de par la sève et le sang, ils partagent une même lettre initiale, symbole peut-être du serpent susurreur qui s'est mélangé une seule fois, mais plus que suffisamment, à l'histoire d'une origine partagée sise au point de l'éternité et du temps, à une époque qui leur fut à tous les deux semi-réveil après le grand sommeil fondateur. Et puis, si l'homme marche et s'il voyage, le plus souvent accompagné du fracas des machines, l'arbre aussi voyage à sa façon, - discrète. Les arbres qui ne voyagent que par leur bruit, dit, joliment, Georges Schehadé.
Tout cela fait de l'arbre - au même titre que l'animal - notre voisin, notre cousin.

  Salah Stétié in " Dans le miroir des arbres ", Fata Morgana, s/c., 2011, pp 11 - 12.
.